Comment apprendre par coeur ?

Les limites de l’apprentissage par coeur

De nombreux élèves se demandent comment apprendre par coeur efficacement et il arrive même que des élèves ayant révisé et appris des définitions ou des dates par coeur n’arrivent pas à s’en souvenir au moment de l’interrogation en classe. Il ne s’agit pas d’un manque de travail, mais plutôt d’un manque de méthode au moment de l’apprentissage par coeur. Apprendre par coeur n’est en réalité pas synonyme de relire et réciter. 

Dans son livre Neurolearning, Philippe Lacroix définit les mots “comprendre” et “apprendre par coeur” pour mettre en lumière les limites de l’apprentissage par coeur. 

Comprendre une information, c’est lui donner du sens par-rapport à ce que l’on sait déjà. Autrement dit, c’est relier le nouveau au connu. Traduit dans le langage des neurosciences, cela signifie qu’au niveau des neurones, de nouvelles synapses lient la nouvelle trace mnésique (fragile) aux traces anciennes (consolidées en mémoire). 

A l’opposé, apprendre par coeur sans comprendre constitue des traces isolées les unes des autres dans la mémoire. Philippe Lacroix parle d'”îlots de connaissance” pour désigner ces connaissance isolées. Ces dernières sont plus difficiles à relier à des traces déjà présentes en mémoire, et donc à consolider. C’est pour cette raison qu’apprendre par coeur ainsi est peu rentable en termes de mémorisation, mais également coûteux en énergie mentale. Apprendre par coeur sans comprendre ne fait que multiplier des îlots de connaissances dont l’accès est difficile. 

Comprendre ne suffit pas pour mémoriser

Toutefois, comprendre ne suffit pas pour mémoriser. L’élaboration de la trace mnésique est un phénomène dynamique, fragile au début de l’apprentissage d’une notion nouvelle. Il faut réactiver cette dernière de nombreuses fois pour faire passer l’information de la mémoire à court terme à la mémoire à long terme où elle sera stockée. Deux processus favorisent la mémorisation :

• le processus de création de liens : relier les éléments de la mémoire à court terme aux éléments présents et déjà en place dans la mémoire à long terme. L’idéal est que cet effort mental intervienne rapidement (au mieux, dans les minutes qui suivent l’exposition à l’information nouvelle à apprendre).

 

• le processus de réactivation : pour retenir une information et consolider la trace mnésique initiale, il faut la répéter dans un laps de temps court. Par la suite, plusieurs réactivations espacées dans le temps sont nécessaires pour que les synapses qui relient les neurones entre eux se renforcent. 

L’importance de la culture générale

Philippe Lacroix souligne que plus on a de connaissances préalables, plus on apprend facilement. C’est pourquoi la culture générale reste importante malgré l’accès à portée de clic de (presque) toutes les connaissances humaines en ligne. Les apprentissages initiaux constituent l’architecture de base sur laquelle viennent se greffer de nouveaux éléments permettant des apprentissages de plus en plus complexes. Le cerveau intègre la réalité en la reliant à ce qu’il sait déjà. 

Philippe Lacroix cite une revue de plus de 800 méta-analyse qui a révélé qu’en matière d’apprentissage, les connaissances antérieures comptent davantage que le QI. Plus les connaissances se développent, plus il est facile d’établir des liens entre le nouveau et l’acquis. Comme l’apprentissage est plus facile, on est motivé pour apprendre.

 

Méthode pour apprendre par coeur 

Comment apprendre par coeur efficacement ?

Philippe Lacroix conseille donc de créer des liens nombreux au moment d’intégrer une nouvelle notion en mémoire. Plutôt qu’apprendre par coeur en récitant plusieurs fois jusqu’à ce que ça rentre, au risque que la trace en mémoire s’estompe rapidement et que l’information ne puisse pas être restituée au moment opportun, des stratégies peuvent être appliquées pour favoriser la compréhension et la rétention en mémoire. En voici quelques exemples qui peuvent (et même doivent) être combinés car c’est la multiplication des indices qui permet de restituer l’information avec aisance et justesse (indices sémantiques, indices sensoriels, indices émotionnels) : 

• Inventer des comparaisons, des analogies et des métaphores

 

• Grouper les informations en blocs et catégories : relier les informations en fonction de leur sens pour former des groupes cohérents et relier chaque nouvelle notion à un groupe existant (cela peut être des mots dont il faut apprendre l’orthographe et qui présentent des régularités, comme des lettres finales muettes communes)

 

• Multiplier les indices susceptibles de ramener l’information dans la mémoire de travail (ces indices étant comme des portes d’entrée de la mémoire) 
  • indices visuels : idéalement, une image ou un schéma et quelques mots clés écrits; codes couleurs pour identifier le plan d’une leçon ou les notions essentielles; symboles pour illustrer un mot (par exemple, le drapeau à côté du nom d’un pays); orthographe illustrée;

• • indices auditifs : répéter avec ses propres mots; nommer de nombreux exemples, autres que ceux de la leçon; inventer une histoire (exemple : Dessiner les difficultés orthographiques pour progresser ); bruitage; musique ou chanson (par exemple, remplacer les paroles d’une chanson par la leçon et chanter l’air); autres types de sons…
• • indices kinesthésiques : dessiner, mimer, compter les idées clés sur les doigts.

 

• Frapper l’imagination par des images et illustrations fortes (couleurs, grand format…), par des anecdotes racontées, par de l’humour, par des surprises, par des émotions agréables, par des défis (cap ou pas cap de réciter en moins d’une minute ? cap ou pas cap de… ?)

 

Des exemples d’application par matière : 

Apprendre par coeur des verbes irréguliers en anglais (prétérit et participe passé)

Liste de mots de vocabulaire à apprendre : 3 idées pour apprendre par coeur

Comment mémoriser des dates en histoire ? 

Dictée de mots : 3 astuces utiles pour apprendre l’orthographe des mots outils invariables

Apprendre par cœur les formules de mathématiques au collège et au lycée

 

Relire et réciter ne sont pas efficaces pour apprendre par coeur

Apprendre par coeur via des relectures et des répétitions n’est donc pas vraiment efficace. Mieux vaut présenter la nouvelle information de façon variée au cerveau car cette information va venir s’arrimer aux acquis préexistants qu’elle vient d’enrichir. De multiples chemins sont alors disponibles pour retrouver rapidement la bonne information au moment souhaité (par exemple, lors d’une interrogation écrite ou orale en cours). 

En conclusion, apprendre par coeur est peu efficace si cela est fait passivement via des lectures et des récitations, sans chercher à créer des liens ou à multiplier les portes d’entrée en mémoire. Diriger son attention, relier le nouveau à l’acquis (comprendre) et mémoriser nécessitent des efforts intenses et personnels.

…………………….

Source : Neurolearning de Philippe Lacroix (éditions Eyrolles). Disponible en médiathèque, en librairie ou en ecommerce.

Commander Neurolearning sur Amazon, sur Decitre, sur Cultura ou sur la Fnac