Un programme d’éducation de l’attention pour les enfants
Le cerveau optimal est celui qui a appris à résister aux forces et distractions qui bousculent son attention.
Notre réseau de neurones décide à chaque moment de ce qui est important et ce qui mérite notre attention. Les neurones ne savent pas faire plusieurs choses à la fois. Il existe plusieurs réseaux de neurones différents et ils ne sont pas toujours d’accord entre eux :
- un réseau oriente notre attention sur ce qui est saillant, ce qui dépasse, ce qui ressort (ex : un cycliste avec un gilet jaune dans la rue);
- un réseau oriente notre attention sur ce qui est joli, attirant au sens esthétique (ex: un joli visage dans une foule);
- un réseau oriente notre attention sur ce qui est plaisant (le circuit de la récompense attire l’attention sur ce qui procure du plaisir);
- un réseau oriente notre attention sur ce qui est à faire (les objectifs).
Si ce dernier réseau sait exactement ce qui est à faire, il sait maintenir la concentration. Ce circuit domine les autres quand l’objectif est clair, compris, bien défini et identifié. Mais ce réseau entre en compétition avec le circuit de la récompense. Or les jeux et les réseaux sociaux sont conçus de manière à stimuler le circuit de la récompense en permanence.
Jean-Philippe Lachaux, neuroscientifique spécialiste de l’attention, parle de “gloutonnerie attentionnelle” comme métaphore de la manière dont les écrans captent et retiennent l’attention… au prix d’une petite sensation d’écoeurement et d’une difficulté à déscotcher.
Une attention pleine et maîtrisée (posée sur un objet à la fois) s’accompagne au contraire d’une joie intense. Selon Jean-Philippe Lachaux, le cerveau optimal est celui qui a appris à résister aux forces et distractions qui bousculent son attention.
Le cerveau augmenté est celui des artistes et des sportifs qui ont développé une capacité à maîtriser leur attention. – Jean-Philippe Lachaux
Jean-Philippe Lachaux estime que nous devrions parler d’un monde “déconnecté” plutôt que d’un monde connecté puisque la connexion aux écrans déconnectent de l’environnement réel, des personnes physiquement présentes à côté. Or cette capacité à être présent aux personnes physiquement à côté est importante pour les compétences émotionnelles et relationnelles. L’empathie et l’amour ont une dimension physique (et c’est bien pour cela que les relations à distance sont si difficiles). Par ailleurs, le toucher est un besoin humain fondamental.
Un programme d’éducation de l’attention pour les enfants
Il ne s ‘agit pas de mettre toutes les technologies basées sur des écrans à la poubelle ni d’interdire les jeux avec récompenses (des points, des coupes, des bonbons virtuels gagnés à chaque niveau dépassé par exemple).
En revanche, il est possible d’apprendre aux jeunes enfants (entre 6 et 12 ans) à maîtriser leur attention et reconnaître les signes de déconcentration : qu’est-ce que cela veut dire “être concentré” ? comment faire pour être et rester concentré ?
Cela peut passer par le fait d’entraîner les enfants à se doter d’une intention très claire quand ils s’engagent dans une activité (quelle est mon intention? mon objectif ? où est-ce que je veux aller ? comment je saurais si j’ai atteint cet objectif ?). Cette intention va guider la perception (qu’est-ce que j’ai besoin de regarder/ écouter pour atteindre l’objectif ?) et la manière d’agir/ de faire pour atteindre l’objectif (qu’est-ce que je vais faire ? comment je vais adapter ce que je fais si cela ne fonctionne pas ?).
Jean-Philippe Lachaux, à travers le programme ATOLE (ATtentif, à l’écOLE), propose plusieurs stratégies à enseigner aux enfants pour leur apprendre à se concentrer :
- l’acronyme PIM pour résumer le processus décrit plus haut (Perception, Intention, majeur),
- l’acronyme PAM pour Proposition d’Action iMmédiate,
- la danse de l’abeille pour remarquer les distractions et revenir à l’activité.
L’idée est d’amener les enfants à reprendre du pouvoir personnel à travers la maîtrise de leur attention et à éprouver l’intense satisfaction née de la connexion à l’environnement réel et aux gens physiquement présents autour d’eux.
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Pour aller plus loin : Les petites bulles de l’attention: Se concentrer dans un monde de distractions de Jean-Philippe Lachaux (éditions Odile Jacob)