Mémoire et oubli : les recommandations des neurosciences pour mieux mémoriser en classe
Mémoire et oubli : les recommandations des neurosciences pour mieux mémoriser en classe
Des conditions favorables au rappel à long terme
L’oubli est un phénomène biologique naturel car, d’une part, il nous protège contre la perception massive d’informations qui nous parviennent en continu et, d’autre part, l’oubli est le résultat d’une limitation de notre mémoire. En outre, des informations sans intérêt finissent par s’estomper car le cerveau estime qu’elles n’ont pas d’utilité.
Pourtant, l’oubli n’est pas synonyme de disparition totale mais peut simplement désigner la difficulté du rappel d’une notion perçue ou apprise. Dans leur livre Apprendre à mieux mémoriser – Du labo à la classe – Collège, Jean-Luc Berthier et Frédéric Guilleray listent quelques facteurs qui peuvent rendre le rappel plus ou moins difficile :
- un apprentissage superficiel (ex : une simple lecture),
- une non consolidation de l’information (via des questions, une reformulation avec ses propres mots, une explication aux autres de la notion…),
- une non réactivation de l’information dans le temps (le “chemin” créé dans le cerveau disparaît peu à peu),
- la qualité de l’attention au moment de l’encodage de l’information en mémoire.
Des émotions fortes et agréables rendent un contenu plus mémorable et le stress empêche la mémorisation. Non seulement les conditions dans lesquelles une notion a été apprise influencent la qualité du rappel, mais le nombre de réactivations ultérieures prévient l’oubli. Il peut être utile de prêter grand soin à l’attention des élèves au moment de leur transmettre des informations : il est possible d’attirer leur attention de différentes manières :
- des mots clés comme “contact”, “attention”, “Stop”, “on lève les stylos”…
- des signes non verbaux, des gestes silencieux
- des gestes sonores qui vont servir de rituels comme donner trois petits coups sur le tableau
Des indices nécessaires pour récupérer les informations en mémoire
Des indices peuvent aider à récupérer des informations en mémoire plus facilement et rapidement. Plus les indices associés à une information donnée sont nombreux et différents, plus la récupération est facilitée. A l’inverse, une partie de l’oubli pourrait être due à la perte et même à la faiblesse des indices en mémoire.
Un indice peut consister en une image associée à une notion, une association d’idées (par exemple, se rappeler de la date 1815 grâce au 18=pompier et 15=samu)…
En classe, il est possible d’utiliser des pictogrammes comme indices de rappel. Ces images ou schémas peuvent être créés par les élèves eux-mêmes car les indices sont plus efficaces quand ils sont personnels. Ainsi, l’Europe comme pôle majeur de la mondialisation peut être représentée avec des pictos pour chaque facteur de puissance (un brin de blé pour l’agriculture, une usine pour l’industrie, un coeur pour le secteur tertiaire et le symbole € pour la monnaie, le tout inclus dans un drapeau européen).
Diversifier le traitement des informations
Jean-Luc Berthier et Frédéric Guilleray estiment qu’il faut au moins 4 ou 5 modalités actives autour d’une même notion. Cela peut passer par des questions à se poser, des exercices d’application, des contextes différents, des modalités diverses (rappel libre, rappel avec indice, QCM…). La mémorisation par répétitions identiques est peu efficace.
Oublier juste assez… pour apprendre
Il est nécessaire de réactiver une information pour la consolider dans la mémoire. L’astuce pour optimiser l’efficacité de la reprise est d’attendre un temps suffisamment long pour que l’effort à accomplir engendre une réactivation significative. L’enjeu des reprises idéales est de ne pas être ni trop proches ni trop éloignées dans le temps.
Pour aller plus loin : [Neurosciences] Mémoriser efficacement à long terme avec des réactivations à intervalle régulier en classe
Avoir confiance dans les capacités de sa mémoire
Des études ont montré la relation entre la connaissance des élèves au sujet de la neuroplasticité et leur confiance en eux.
Par la connaissance du fonctionnement de leur cerveau, les élèves comprennent et s’approprient plus facilement les stratégies de mémorisation, l’effet de l’effort, la nature et les bénéfices de l’oubli et des erreurs. – Jean-Luc Berthier et Frédéric Guilleray
Il peut donc être utile de présenter la plasticité neuronale aux élèves et de leur parler de l’état d’esprit de développement.
La capacité à apprendre des humains n’est pas fixée à la naissance (on ne naît pas avec une quantité d’intelligence limitée). Les humains peuvent apprendre à tout âge car apprendre, c’est créer de nouvelles connexions neuronales dans le cerveau . C’est ce qu’on appelle la neuroplasticité. Chaque fois que nous apprenons quelque chose, nous transformons notre cerveau et plus cette chose sera utilisée, testée, accrochée à d’autres connaissances, plus elle sera mémorisée à long terme.
Les neurones qui s’activent ensemble finissent par se connecter à la suite des apprentissages mais ce sont les actions répétées qui renforcera leur connexion.
Le cerveau est comme une forêt : si on marche plusieurs fois dans le même sentier, un chemin va progressivement se créer. Dans le cerveau, il y a création de sentiers de communication entre les neurones. Ces sentiers (connexions neuronales) deviennent de plus en plus efficaces et mènent à l’automatisation des processus liés à une certaine tâche et donc à la résolution plus faciles de certains problèmes.
Apprendre, c’est bien créer des connexions entre des neurones. Les choses deviennent plus faciles et on est capable de les faire de mieux en mieux car le chemin est “défriché”, les informations passent plus rapidement d’un neurone à l’autre par ces voies de communication. Plus on utilise le cerveau pour créer des connexions neuronales, plus on apprend. Mais si on ne marche pas pendant un bon bout de temps dans les sentiers, la végétation reprend sa place. Cela signifie que les réseaux de neurones non utilisés finissent par se déconnecter progressivement. leur intelligence se développe et se travaille : plus ils stimulent leur cerveau de manières différentes (exercices, entraînement, projets, trouver des exemples, débattre…), plus ils apprennent et développent leur intelligence.
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Source : Apprendre à mieux mémoriser – Du labo à la classe – Collège de Jean-Luc Berthier et Frédéric Guilleray (éditions Nathan). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.
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