L’enfant dans la nature : un livre pour mettre la nature au centre du développement et de l’apprentissage des enfants
L’enfant dans la nature : un livre pour mettre la nature au centre du développement et de l’apprentissage des enfants
Présentation de l’éditeur
Les enfants vivent aujourd’hui entre quatre murs, coupés de la nature. Ils souffrent d’obésité, d’hypertension, de dépression, de troubles du comportement, etc. Quelle est la responsabilité du modèle éducatif ? Couper la jeunesse d’un monde extérieur qui pourtant l’aide à grandir n’est-il pas inadapté et dangereux ?
Pour accompagner les enfants dehors, des initiatives fleurissent. Matthieu Chéreau et Moïna Fauchier-Delavigne ont voulu en savoir plus et ont rencontré des chercheurs, des éducateurs, des enseignants, ces pionniers qui se penchent sur l’importance des milieux naturels, des arbres, de la terre et de l’eau dans le bien-être de l’enfant. Ils se sont aussi rendus dans ces écoles en Europe où la classe se fait à ciel ouvert. Où l’enfant fait l’expérience de la nature.
Cette formidable enquête nous révèle qu’un mouvement qui met la nature au centre du développement et de l’apprentissage de l’enfant croît rapidement dans le monde, et prend forme en France. Les résultats sont là : les enfants qui bénéficient de cette approche acquièrent des compétences solides – d’un point de vue physique, mais aussi cognitif et social – et une appétence indéniable à la joie.
Une autre éducation est possible, grâce à laquelle l’enfant redécouvre la richesse du monde dans lequel il vit.
Les auteurs : Matthieu Chéreau est auteur de livres sur l’éducation (Préparons nos enfants à demain. Ces compétences qu’ils ne trouveront pas à l’école, Eyrolles, 2018) et consultant ; Moïna Fauchier-Delavigne est journaliste au Monde, où elle traite les questions d’éducation. Elle a notamment publié de nombreux articles sur la pédagogie par la nature et les écoles en forêt. Ils se sont rencontrés en devenant parents à Paris, ayant tous deux l’intuition qu’il manquait à leurs enfants un lien avec la nature. Ils partagent leurs travaux sur lenfantdanslanature.org.
Les points forts
Ce livre nous invite à comprendre l’importance du contact quotidien des enfants avec la nature et propose des pistes pour “ensauvager” les écoles (et le quotidien de manière plus générale).
Les auteurs, Matthieu Chéreau et Moïna Fauchier-Delavigne, partent de l’hypothèse que l’éducation doit se penser dans la nature et avec elle. Ils regrettent que ce besoin de nature restent encore un non-sujet dans les débats autour de l’éducation (et n’a pas de place réelle dans les programmes). Personne ne cherche à priver volontairement les enfants de nature mais l’organisation de nos modes de vie et des écoles est ainsi faite que les besoins de nature des enfants sont peu (voire pas) comblés (ni même pensés).
La notion même de jeu a évolué : les jeux sont passés d’une activité extérieure en quasi liberté à une activité intérieure sous la supervision des adultes (ou bien dehors dans des cours de récréation goudronnées ornées d’un ou deux platanes – que Moïna Fauchier-Delavigne et Matthieu Chéreau qualifient de “parkings“).
Les enfants sont aujourd’hui déconnectés de la nature, du milieu végétal comme du monde animal, de la nature sauvage ou même aménagée. Bien au chaud dans leurs chambres, leurs écoles, leurs clubs de sport, les voitures et plusieurs heures par jour devant les écrans. Leur espace s’est considérablement rétréci. Ils sont devenus des enfants d’intérieur. – Moïna Fauchier-Delavigne et Matthieu Chéreau
Le livre est organisé autour de 12 chapitres :
- Des enfants coupés de la nature
- L’urgence de toucher terre
- Déployer le jeu
- Prendre des risques pour grandir
- De l’espace, du temps et du silence
- La créativité par les bouts de bois
- Ouvrir l’école à tous et à toutes
- Les Britanniques font leur révolution verte
- Les pionniers français
- Les éducateurs à la rescousse pour apprendre dehors
- Repenser l’espace
- Des écoles françaises dans la nature
Moïna Fauchier-Delavigne et Matthieu Chéreau écrivent que les pays nordiques sont en avance sur nous en matière d’aménagement des espaces scolaires, et notamment des extérieurs. Les principales différences en termes de présence de nature résident dans la présence de :
- petits arbustes,
- petits recoins pour se cacher et être au calme (compartimenter des espaces plus petits),
- petits chemins ou passages secrets
- arbres fruitiers et plantes mellifères,
- fleurs qui sentent bon et fleurissent à différents moments de l’année
- pierres, troncs, rochers et souches à escalader
- espaces délimités, petits formats
- volumes (buttes, tas de pierres, petites collines) et matières différentes (feuilles séchées, terre humide, galet froid…)
- bac à sable ou, mieux, bac à terre
- barres fixes à différentes hauteurs
- terrains variés (dur, mou, cyclable, creusable)
- potager
Tout y fait pour que le bitume ne devienne que des passages, des chemins et que l’essentiel soit ailleurs. Les extérieurs sont aménagés ainsi de manière à prendre en compte les besoins physiques (courir, sauter, rouler, être en équilibre, changer d’espace, toucher, cueillir, construire, creuser) mais aussi les besoins relationnels (jouer ensemble, faire ensemble, coopérer), et cognitifs (créer des choses, découvrir par tous les sens, comprendre, imaginer, rêver).
La cour classique, avec un grand espace plat, tout ouvert, goudronnée ou bétonnée, c’est un environnement très stressant pour les enfants. Le pire qui soit. Au final, ça n’est qu’un grand terrain de foot pour une quinzaine de garçons. Les autres se cachent, sur les côtés, ou même dedans quand ils peuvent. – Lene Nielsen (paysagiste, conceptrice de terrains de jeu à Copenhague)
L’idée est que la cour d’école ainsi aménagée soit pratique à la fois pour les enfants (pour jouer) et pour les adultes (peu d’entretien, lâcher prise sur le désherbage) . Par ailleurs, ce type de cour d’école verte prend en compte les enjeux bioclimatiques (rafraichissement, biodiversité).
Lene Nielsen reconnaît que deux grands problèmes se posent et freinent la propagation de ce type d’extérieur dans les pays non nordiques :
- la question de l’entretien : ce problème peut être traité en amont lors de concertation (avec la mairie, les enseignants et les parents) et de processus de résolution de conflit (souvent, les parents de l’école offrent leurs bras et leur temps pour participer à l’entretien)
- la question de la sécurité : Lene Nielsen estime que la France est “malade de ses normes” bien que le pays soit signataire de la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE) qui oblige à protéger les droits des enfants.
Dans les pays nordiques, l’état d’esprit consiste à dire que le risque est présent partout (avec ou sans tas de pierres à escalader) et que les enfants apprennent mieux à prendre des risques mesurés dans un environnement riche et ouvert. Les risques évidents sont évidemment écartés (du type une structure de balançoire défectueuse ou des substances toxiques dans un jouet).
Matthieu Chéreau et Moïna Fauchier-Delavigne regrettent qu’en France, nous soyons loin d’un mouvement général ou même d’une prise de conscience ou d’une volonté d’en haut. Face aux problèmes de sédentarité, d’attention et de violence, le gouvernement tarde à réagir et ne remet toujours pas en cause l’aménagement même de l’environnement scolaire. Toutefois, des initiatives locales peuvent éclore, comme c’est le cas à Strasbourg (et ailleurs). A Strasbourg, des arbres fruitiers sont plantés dans certaines cours d’école plutôt que des platanes (la moitié des écoles primaires y dispose d’un jardin pédagogique).
Une école du centre ville strasbourgeois a même créé un espace vert ensauvagé en son sein. Les enseignantes, aidées d’une animatrice nature, ont planté des arbres, des arbustes et des plantes vivaces, ont rapporté des matériaux (branches, souches, cailloux, sable) et ont construit une butte de terre d’un mètre de haut pour transformer de fond en comble une partie de l’extérieur. Une partie de la cour a été débétonnée par le service technique de la ville en accord avec la mairie et des aménagements se sont poursuivis (mise en place d’une mare sèche, d’un petit pont, d’un grenier à insectes…). L’entretien des lieux est réduit et les plantes sauvages y poussent librement (pas de tonte, peu de taille, feuilles non ramassées). Les dix classes de l’école pratiquent l’école du dehors tous les jours (en s’inspirant des recommandations de Sarah Wauqiez, pédagogue par la nature).
J’ai une certitude : le “Touche pas”, “Prends pas”, c’est pas possible. Il faut en sortir, sinon on est foutu. Dans notre société, on nous pousse à avoir un amour platonique et intello avec la nature. C’est impossible. Si on ne touche pas la nature, on ne l’aime pas. Le corps doit être en action pour que le cerveau se développe et pour que les enfants s’attachent à la nature. – Louis Espinassous
J’ai beaucoup aimé ce livre parce qu’il alterne théorie avec de nombreuses mentions à des études menées autour du monde ainsi que des experts de l’éducation nature (Louis Espinassous, Sarah Wauqiez, Richard Louv…) et pratique avec des exemples d’écoles et de communautés qui ont fait leur “révolution verte”.
Je suis ressortie de la lecture de ce livre partagée entre une grande tristesse, voire de la colère, parce que nos organisations sont complètement inadaptées (les villes, les logements, les écoles) et un grand espoir de voir les lignes bouger un peu partout (et l’envie d’aller plus loin dans ce que je fais moi-même au quotidien : cultiver un plus grand jardin, partir en balade en forêt plus souvent, marcher pieds nus dehors plus souvent…). Ce livre a une force que d’autres sur le même sujet n’ont pas : celle de montrer que les écoles peuvent réellement se transformer, même en ville, et qu’un mouvement (que nous pouvons faire le choix de rejoindre) est en marche.
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L’enfant dans la nature de Matthieu Chéreau et Moïna Fauchier-Delavigne (éditions Fayard) est disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.
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Crédit illustration : zirconicusso