Faire face à l’anxiété des enfants à l’idée de la rentrée scolaire

Faire face à l’anxiété des enfants à l’idée de la rentrée scolaire

anxiete-des-enfants-rentree-scolaire

La rentrée des classes après les grandes vacances d’été peut être source d’anxiété chez certains enfants (et encore plus chez ceux qui changent de niveau comme l’entrée à la maternelle, au CP ou encore au collège).

D’après Sonia Lupiens (chercheuse en neurosciences) ,les facteurs du stress sont :

  • le sens du contrôle diminué (impression de perte et de ne rien pouvoir décider)
  • la personnalité menacée (quand l’ego se sent en danger)
  • la nouveauté (qui fait émerger la peur d’affronter l’inconnu)
  • l’imprévisibilité (quand on ne peut rien anticiper)

Rien d’étonnant donc à ce que la rentrée des classes soit source de stress et d’anxiété car la rentrée scolaire cumule tous ces éléments. Cette anxiété peut être générée par des incertitudes sur le fait de retrouver ses amis, sur la peur de se retrouver en échec ou d’être submergé par le travail à fournir  ou encore sur l’appréhension d’avoir des enseignants peu aimables.

Quand un adulte se penche vers un enfant et lui dit “Comme tu dois être content de retourner à l’école !”, cela se rapproche du fait de dire à un adulte qu’il doit être content d’escalader l’Everest la semaine prochaine sans préparation. – Joan Munson, psychologue

Il est donc important d‘accueillir les émotions douloureuses des enfants face à l’idée de la rentrée scolaire en se retenant dans un premier temps de lui montrer les bons côtés de l’école. Il s’agit donc de dire “Oh, je vois que tu as peur/ que tu es angoissé et c’est bien normal” plutôt que “Mais non, tu verras, ça va être bien : tu vas te faire de nouveaux amis et tu vas apprendre plein de choses”. Il est important de garder en tête ce principe : pas de redirection du comportement sans une profonde connexion émotionnelle d’abord !

La seule manière d’accompagner un enfant avec empathie est d’accueillir les émotions qui le traversent en les lui reflétant et en manifestant de la compréhension pour son monde intérieur. Quand un adulte se relie à ce que l’enfant vit, ce dernier voit son besoin d’empathie nourri et peut s’apaiser. Le dialogue peut alors intervenir dans une deuxième temps pour recadrer les pensées angoissantes et proposer des stratégies pour aller mieux.

Accueillir la peur des enfants face à la rentrée scolaire avec empathie

1. Accueillir non verbalement par le regard

L’attitude intérieure est plus importante que les mots employés. Être présent dans la respiration, dans l’attitude intérieure peut parfois suffire, et est quoiqu’il en soit une condition à une écoute émotionnelle efficace.

Une reformulation parfaite peut être inefficace si elle ne vient pas du cœur, si elle n’est pas chargée d’empathie.

2. Mettre des mots sur le ressenti

Respecter les émotions des enfants sans entrer dans un jeu de pouvoir : “je vois que tu as peur et que c’est difficile pour toi”

Reformuler sans juger, sans commenter ni intervenir : “oh, tu es triste”, “tu n’en as pas envie du tout”

Accueillir l’émotion en respectant les nuances vécues par l’enfant : “tu es tellement triste à l’idée de retourner à l’école, tu n’en as pas du tout envie !”

Écouter avant de consoler : “je vois que tu as mal”

Écouter de l’intérieur ce que l’enfant est en train de vivre : “Tu ressens plusieurs émotions mélangées on dirait. J’ai l’impression qu’il y a de la tristesse, de la peur. Est-ce que c’est ça ?”

Valider le vécu : “Tu as le droit de ne pas avoir envie, c’est vrai, tu préfèrerais rester en vacances, je peux comprendre ça.”

3. Permettre à l’émotion d’aller jusqu’à sa résolution

L’émotion est une structure en 3 étapes :

  • la charge : quand ça monte à l’intérieur, quand on ressent les sensations corporelles liées à l’émotion (gorge sèche, rythme cardiaque qui s’accélère…)
  • la tension : on utilise l’énergie de l’émotion dans une action, une parole, un comportement
  • la décharge :  le moment où l’on pleure, crie, tremble… La décharge n’est que la 3° partie de l’émotion, c’est l’étape qui permet le retour au calme.

Par exemple, pleurer fait du bien en cas de peur ou de tristesse. Dire « ne pleure pas/ c’est pas grave » revient à dire « Garde ta douleur à l’intérieur de toi/ ce que tu ressens n’est pas normal donc tu n’es pas normal/ je ne suis pas là pour toi quand tu vas mal».

Au contraire, on pourrait encourager les enfants qui éprouvent de l’anxiété face à la rentrée scolaire à pleurer :

« Tu peux pleurer et ça fait du bien. »

« Serre-moi et pleure, pleure fort si tu en as besoin, je suis là pour toi. »

 

Recadrer les pensées et proposer des stratégies de régulation émotionnelle seulement quand le calme est revenu

Identifier les peurs spécifiques et les pensées qui les accompagnent

Les enfants anxieux à l’idée de la rentrée scolaire ne sont pas tous anxieux pour les mêmes raisons. Il est donc utile de mettre des mots sur les peurs spécifiques de chaque enfant afin de pouvoir apporter des réponses spécifiques elles aussi. De plus, le simple fait de nommer les émotions difficiles avec précision en réduit l’intensité.

Cette identification peut passer par des questions pour se rapprocher de la vérité personnelle de l’enfant :

  • Interactions sociales : J’ai l’impression que tu as peur de te retrouver tout seul à la récréation et tu te dis que ce sera trop difficile de te faire de nouveaux amis. Est-ce que c’est ça ? 
  • Notes et compétences académiques : Tu as peur que ce soit trop dur et de ne pas y arriver ? Tu as peur d’avoir trop de devoirs ? Tu te dis que ce sera trop difficile.
  • Organisation : Tu as peur que tes fournitures ne soient pas complètes ? Tu te demandes si tu as choisi le cartable le plus adapté ?
  • Séparation d’avec les parents : Tu ne veux pas qu’on soit séparé toute la journée ? Tu préfèrerais rester encore à la maison avec moi ?
  • Coronavirus : C’est vrai que cela peut être inquiétant de ne pas vraiment savoir comment ça va se passer. Est-ce que tu voudrais qu’on regarde une vidéo sur les gestes barrière ?  (il existe des vidéos adaptées à différentes tranches d’âge sur Internet comme cette vidéo de l’UNICEF avec les Miraculous ou la chanson Coronaminus du groupe Aldebert)

Avec les plus jeunes, le jeu avec des figurines (type Playmobil, Lego ou peluches) peut aider à trouver les mots justes. Les adultes peuvent créer des scénarios en fonction des peurs perçues de l’enfant et amorcer le jeu à partir de ce scénario en invitant l’enfant à jouer et en le laissant continuer le jeu pour voir là où il le mènera en fonction de ses préoccupations du moment.

 

Recadrer les pensées négatives par des pensées positives

Une fois les émotions accueillies et les pensées identifiées, il est possible de montrer aux enfants comment les contre carrer. Cela peut passer par le fait de faire un tableau avec deux colonnes :

  • la première colonne sera intitulée “Ce qui me fait peur” et fera la liste des pensées à l’origine de l’anxiété;
  • la deuxième colonne sera intitulée “Ce qui va m’aider” et fera la liste de choses à faire pour contre-carrer chaque pensée anxieuse.

En voici des exemples :

motiver pour réviser

 

contredire auto critiques enfants

 

 

Proposer des stratégies de régulation émotionnelle

Je vous propose une affiche avec des stratégies de régulation du stress pour les enfants qui peut être affichée en classe ou à la maison. Les enfants y trouveront des solutions d’expression émotionnelle en cas d’émotions douloureuses.

affiche stress enfants

 

Anticiper les difficultés et y trouver des solutions avant le jour J

Cette étape peut passer par le fait de se préparer pendant les vacances et de mettre en place une routine du matin sans stress :

  • faire le trajet jusqu’à l’école pour repérer le chemin,
  • faire le tour de l’établissement à pied pour repérer l’entrée et la sortie, les alentours,
  • reprendre la liste de fournitures avec l’enfant et remplir le cartable en fonction pour rassurer l’enfant
  • la veille de la rentrée, proposer des rituels du coucher apaisants (massage, méditation du sommeil, visualisation positive) et préparer le plus de choses possibles pour limiter l’imprévu (ex : préparer et sortir les vêtements la veille au soir, dresser la table du petit déjeuner la veille au soir, parler des différentes étapes de la journée à venir…)
  • le jour de la rentrée, dessiner une marque d’amour sur le poignet de l’enfant (ex : un coeur) ou lui laisser un petit objet choisi ensemble dans la poche (ex : une plume ramassée pendant les vacances)
  • appliquer du parfum (celui du père ou de la mère) sur une partie des vêtements de l’enfant qu’il pourra sentir quand il en a besoin
  • glisser une photo ou un petit mot dans l’agenda ou la trousse

 

A noter qu’en France, l’école n’est pas obligatoire, seule l’instruction l’est. L’Instruction En Famille (IEF) peut être une voie à explorer en fonction des besoins des enfants et de vos possibilités.

…………………………………………………….

Pour aller plus loin, je vous propose la lecture de mon livre paru aux éditions Larousse : 50 activités bienveillantes et anti-stress pour les enfants (6/12 ans). J’y propose des outils pour apprivoiser le stress, pour construire la résilience et la confiance en soi et pour mieux se préparer dans le cadre scolaire (apprendre à apprendre, s’organiser, faire les devoirs).

Crédit illustration : freepik.com