Respecter l’intégrité des enfants, axe central et non négociable de l’éthique des enseignants

Respecter l’intégrité des enfants, axe central et non négociable de l’éthique des enseignants

Respecter l'intégrité des enfants éthique enseignants

Dans leur livre De l’obéissance à la responsabilité. Compétence relationnelle en milieu pédagogique, Jesper Juul et Helle Jensen estiment que l’intégrité personnelle des enfants (et adolescents) est le pré-requis à prendre en compte par les professionnels de l’éducation quand il s’agit d’éthique professionnelle.

Selon les deux auteurs, le respect de l’intégrité des élèves doit être plus important que les objectifs pédagogiques ou l’usage de méthodes disciplinaires qui portent atteinte à l’intégrité d’un individu (punition, récompense, humiliation…). Les élèves sont avant tout des enfants et des adolescents et donc des individus humains dont les droits humains fondamentaux doivent être respectés.

Juul et Helle élargissent ce respect de l’intégrité aux collègues des professionnels de l’éducation.

Enfin, les enseignants et autre personnel travaillant dans des établissement scolaires ont également le droit au respect de leur propre intégrité (à la fois par les autres adultes et par les élèves). Toutefois, les adultes restent responsables de la qualité de la relation avec les enfants (sinon, à quoi cela servirait-il d’être adultes ?). Il est donc hors de propos de répondre à un enfant insolent, destructeur ou insultant par une atteinte à son intégrité (humiliation, sarcasme…). Les professionnels de l’éducation sont responsables de leur propres compétences émotionnelles et relationnelles, et, s’ils se sentent dépassés ou incompétents, ils ont le devoir de demander de l’aide à la hiérarchie ou à l’institution.

Juul et Helle estiment que, quand les adultes manquent de respect aux enfants, ces derniers finissent par se convaincre qu’ils sont mauvais. Cette étiquette les autorise en quelque sorte à agir en se conformant à cette étiquette (clown de service, insolent, paresseux…). Ce type d’étiquette amène les élèves à faire encore plus ce qu’ils faisaient et qui a déclenché la répression de la part de l’adulte.

Les deux auteurs plaident donc pour un respect mutuel et ce qu’ils appellent “équidignité“. Pour eux, l’utilisation par les adultes d’un langage personnel et l’expression de leurs propres limites personnelles est l’élément clé qui rend caduc l’emploi de menaces, de punitions, d’exclusion ou encore de récompenses. Juul et Helle rappellent que les enfants préfèrent être avec des gens qu’ils peuvent respecter et qui les respectent dans les faits. Il y a deux conditions préalables pour y parvenir :

  • l’adulte montre l’exemple et la voie en respectant l’enfant (ou l’adolescent)
  • l’adulte est crédible car il aligne ses actes et ses mots (par exemple, il sait s’excuser quand ses mots débordent)

C’est dans le cadre de ces relations que les enfants apprennent à “respecter les autres personnes, plutôt qu’à respecter essentiellement le pouvoir qu’elles représentent“.

Qu’une relations soit empreinte d’équidignité signifie que les points de vue, les sentiments, l’expérience des deux partenaires et la compréhension qu’ils ont d’eux-mêmes ont la même valeur au regard de la manière dont la relation s’établit et se développe. Que rien ne soit dénigré parce que l’un d’entre eux le considérerait comme puéril, irréaliste, sage, mature, immature, féminin, masculin, etc. – Juul et Helle

Cette notion d’équidignité est difficile à atteindre car nos systèmes éducatifs sont construits sur une structure hiérarchique pyramidale, où les enseignants donnent des ordres et ont le pouvoir de faire du mal aux élèves (à travers des punitions, des privations de récréations et de cours appréciés comme le sport, des exclusions…). Les adultes eux-mêmes ont vécu cela dans leur enfance et tout au long de leur scolarité et ont peu de modèle autour d’eux à copier ou dont s’inspirer pour faire autrement (les familles fonctionnent de manière pyramidale, comme les entreprises et la vie politique).

Juul et Helle considèrent que l’équidignité est une qualité éthique à rechercher et à construire et qu’elle s’inscrit dans un dialogue permanent avec les enfants et leurs parents. Ce type de relation est éminemment énergivore et chronophage (d’autant plus quand les collègues – et la hiérarchie – raillent ces tentatives ou mettent carrément des bâtons dans les roues des enseignants qui s’y essaient).

L’équidignité est indissociable de la prise au sérieux : prendre les émotions, les besoins et les avis des enfants au sérieux et prendre nos propres émotions et besoins au sérieux en les exprimant dans un langage personnel non accusatoire ou humiliant.

De même, l’équidignité s’appuie sur une attitude relationnelle (et non pas sur une technique de communication douce pour amener les enfants à faire ce qu’on attend d’eux). Cette forme de dialogue repose sur la capacité et la volonté d’être ouvert et sensible à la réalité de l’enfant et à prendre en compte la réalité de l’enfant. Cette ouverture et cette sensibilité n’impliquent pas nécessairement pour les adultes d’être toujours d’accord avec les jeunes mais ouvrent la voie à une compréhension mutuelle, elle-même base d’une solution commune respectueuse des besoins des uns ET des autres.

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Source : De l’obéissance à la responsabilité. Compétence relationnelle en milieu pédagogique de Jesper Juul et Helle Jensen (éditions Fabert). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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