6 moteurs pour faciliter les apprentissages

6 moteurs pour faciliter les apprentissages

Je vais développer cette notion de facilitateurs d’apprentissage :

  1. La richesses des interactions sociales et de l’environnement,
  2. Les histoires (“story telling”),
  3. Les jeux,
  4. Les projets personnels et porteurs de sens,
  5. Faire,
  6. La redéfinition des échecs et des erreurs.

 

N°1. La richesse des interactions sociales et de l’environnement

Les adultes entourant les enfants doivent être bienveillants : des aidants et non des juges.

Tous capables, c’est déterminant !

Les adultes aidant le développement des enfants ne peuvent pas être des juges, des censeurs. Une personne qui évaluerait, qui ferait des remarques (comme « mais tu ne sais pas encore ça!) est la dernière personne à qui les enfants voudraient demander de l’aide. Ils se sentent plutôt nerveux, angoissés, et même stressés, au contact de ce type de personnes.

Les adultes bienveillants, qui n’émettent pas de jugement en fonction de normes, de paliers par âge, sont ceux vers lesquels les enfants pourront se tourner en cas de difficultés, et auxquels ils pourront se confier : « Je ne sais pas du tout comment faire. Je me suis trompé. J’ai besoin d’aide. »

Le « mélange » d’enfants de tous âges profitent aussi bien aux petits qu’aux grands.

Peter Gray, auteur de Free to learn, milite en faveur de classes mixtes, dans lesquels des enfants de tous âges se cotoyeraient.

Les enfants d’un même âge n’ont pas forcément grand chose à s’apprendre mutuellement. Les interactions sont plus riches quand les écarts d’âge sont plus grands.

L’immersion dans un groupe est bénéfique quand ce groupe est une communauté stable et démocratique.

Les enfants ont besoin de reconnaissance et d’appartenance : les communautés dans lesquelles chaque enfant sait que ses idées et ses actions sont prises en compte et débattues par les autres membres de sa communauté comblent ces deux besoins fondamentaux. Les enfants se sentent à la fois responsables d’eux mêmes mais aussi des autres. Ils apprennent à s’auto gérer, à établir des règles en fonction des besoins de chacun et des problèmes rencontrés au fur et à mesure qu’ils émergent dans la vie en collectivité. Les interactions façonnent le fonctionnement de la communauté.

Des “réseaux sociaux” d’apprentissage

Laurène Castor, créatrice du blog Edutopies et fondatrice de la New World University, parle de “réseaux sociaux” : les communautés dont on fait partie, les associations qu’on a intégrées, la famille et les amis, les réunions et conférences auxquelles on assiste, les groupes de pairs, les interactions avec des personnes d’horizons et surtout d’âges divers…

Ces “réseaux sociaux” ont plusieurs avantages quand on parle d’apprentissages :

  • stimuler le partage autour d’intérêts communs
  • enseigner aux autres permet de mieux apprendre soi-même
  • apprendre par observation et imitation

 

N°2. Des histoires

Laurène Castor parle de “story telling”:

  • jouer avec l’imaginaire,
  • replacer une information dans un contexte narratif,
  • provoquer des images et des films mentaux,
  • ressentir des émotions,
  • s’identifier avec les personnages,
  • suivre leurs aventures,
  • être captivé.

Les histoires participent à enregistrer profondément les informations dans la mémoire.

C’est ainsi que de nombreuses méthodes pédagogiques s’appuient sur les histoires pour rendre des notions plus faciles et ludiques :

– La méthode Multimalin en mathématique : apprendre les tables de multiplication grâce à de petites histoires

technique de mémorisation des tables de multiplication

 

– La méthode des Alphas pour apprendre à lire à partir de personnages à manipuler mis en scène dans un dessin animé et des aventures. Les Alphas sont des figurines qui ont la forme des lettres et qui ont une raison de faire le son de la lettre (par exemple la fusée a une forme de F et fait le son fffff dans le dessin animé).

coffret des alphasla planète des alphas

Hugo et les rois Etre et Avoir pour apprendre la grammaire et l’orthographe

apprendre grammaire et orthographe

N°3. Des jeux

Les jeux stimulent la stratégie, l’imagination, la créativité et la construction d’un autre possible.

Laurène Castor parle de jeux au sens général :

  • les jeux libres et non guidés,
  • les jeux à visée pédagogique pour stimuler une ou plusieurs compétences/connaissances,
  • les jeux pour développer les fonctions exécutives des enfants,
  • les jeux de société à règles,
  • jeux vidéos,
  • sports,
  • jeux de cartes…

Pour Peter Gray, les temps de jeux, d’exploration et de poursuite des centres d’intérêt propres doivent être illimités. Le jeu libre, non structuré, auto guidé est au coeur du développement de l’enfant. Quand Peter Gray dit « illimité », il l’entend au sens propre : bien plus qu’une heure par jour ou même que trois heures par semaine. Essayer différentes choses, tester des hypothèses, s’entrainer, faire, défaire et refaire, tout cela demande du temps.

Trouver sa passion, la pratiquer, la creuser, l’enrichir, requiert du temps non contraint, non borné.

Il est impossible d’interrompre des activités par des sonneries et de décider pour les autres comment ils vont occuper leur temps tout en s’attendant à ce qu’ils trouvent leur élément, à ce qu’ils apportent leur talent au monde pour faire une différence positive.

 

N°4. Des projets réels et personnels, porteurs de sens

Tous les apprentissages, c’est pour vivre !

Les projets réels sont les objectifs qu’on se fixe et qui nous stimulent, ce qu’on entreprend par motivation personnelle. Ils peuvent prendre de nombreuses formes :

  • un stage,
  • une compétition,
  • quelque chose à construire,
  • un record à battre,
  • un livre à écrire,

C’est dans la poursuite de nos projets réels, personnels, porteurs de sens et choisis librement qu’on développe le plus de compétences : je ne sais pas comment je vais faire mais je vais le faire !

Ce qui a du sens est ce qui nous fait du bien, ce qui nous est favorable et agréable. Cette recherche et cette application de projets personnels porteurs de sens nécessitent de pouvoir compter sur notre “boussole intérieure” : je sais exactement ce qui est juste pour moi à ce moment-là. L’école a tendance à couper de l’instinct naturel d’apprendre et de cette “boussole intérieure” car le temps et l’espace y sont contraints.

L’éducation consiste alors à libérer le potentiel créateur de chacun d’entre nous, à libérer nos âmes d’enfant et à mettre tout notre possible dans nos projets.

 

N°5. Faire

On pourrait affirmer que la seule manière d’apprendre, c’est de faire ! Il y a quatre paliers quand nous apprenons :

  • être inconsciemment incompétent (je ne sais pas que je ne sais pas)
  • être consciemment incompétent (je sais que je ne sais pas)
  • être consciemment compétent (je sais que je sais)
  • être inconsciemment compétent (je ne sais pas que je sais) car le savoir est automatisé à force d’entrainement et de répétition.

Prendre conscience de ce qui ne va pas, du manque (de compétence ou de connaissance) déclenche la recherche et l’apprentissage. L’apprentissage est efficace seulement quand ce déclenchement est personnel : qu’est-ce qui est bon/juste/agréable pour moi ? qu’est-ce qui me manque pour atteindre ce qui est bon/juste/agréable pour moi ?

Les humains (et les enfants humains) apprennent en faisant : pour apprendre à faire quelque chose, je dois faire ce que je ne sais pas faire pour apprendre à le faire. Et ils le font d’autant plus et mieux quand ils sont enthousiasmés et motivés (on revient au point n°4 précédent).

 

N°6. Une redéfinition des échecs et des erreurs

La connexion, les histoires, les jeux et les projets sont des moteurs pour apprendre et permettent l’affirmation de soi.

Pour autant, les apprentissages ne sont pas faciles : il y aura toujours des erreurs, des échecs, des obstacles et des sources de stress sur le chemin. Apprendre nécessite d’accepter l’incertitude et la remise en question, l’invalidation de certains croyances.

Quand les facilitateurs de l’apprentissage sont là, le “fun” est plus fort que la “souffrance” car ils stimulent le courage, la remise en question, la connaissance de soi et des autres, l’épanouissement personnel. Pour autant, personne n’a dit que le bonheur est confortable !

Toutes les personnes qui ont créé quelque chose l’ont fait parce qu’elles ont senti qu’elles n’avaient pas le choix, qu’elles devaient le faire : elles ont été poussées par quelque chose qui les anime et les motive, même si elles étaient tiraillées par la peur et le stress.

 

Il est donc vital de prendre garde à l’école et à la maison à ne pas “confisquer” ce droit à apprendre naturellement du fait de l’espace et du temps contraints, de la peur (décevoir, échouer, se tromper, ne pas être à la hauteur, ne pas pouvoir accéder au niveau supérieur…), de la soumission à un enseignant.

 

L’alternative à l’éducation, c’est l’apprendre ! – Jean-Pierre Lepri (enseignant français, auteur de La fin de l’éducation)

 

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