Adapter les rythmes scolaires et l’environnement de la classe plutôt qu’adapter les enfants (assurer les réelles conditions de la réussite pour tous)

Adapter les rythmes scolaires et l’environnement de la classe plutôt qu’adapter les enfants (assurer les réelles conditions de la réussite pour tous)

Adapter les rythmes scolaires et l'environnement de la classe plutôt qu'adapter les enfants

Dans son livre L’échec scolaire n’existe pas ! Une nouvelle chance pour votre enfant, Juliette Speranza, ex-enseignante et membre de l’association La Neurodiversité-France, estime que l’environnement proposé aux enfants au sein de l’école présente un paradoxe : nous visons la réussite en n’assurant pas les conditions de celle-ci. Elle regrette que les rythmes des enfants, leur corps et leurs besoins ne soient pas respectés dans la manière dont est conçue l’école française.

A l’école, les manifestations de fatigue, de faim, d’angoisse, de sensibilité au bruit sont considérées comme des empêcheurs d’apprendre à ignorer plutôt qu’à prendre en compte pour adapter les rythmes scolaires et aménager les classes. La non prise en compte des besoins des enfants mènent à des violences qui peuvent s’exprimer à travers des phrases du type  « Ne bouge pas pendant trois minutes », « Le premier qui se lève a un mot dans son carnet », « Si tu joues encore avec ta règle, je la jette par la fenêtre », ou encore « Tu écoutes, et tu arrêtes de dessiner ». Les enfants ne font pas de caprices ou ne cherchent pas à se soustraire au travail quand ils bougent en classe, quand ils baillent, quand ils se disent gênés par le bruit ou la lumière, quand ils demandent à aller aux toilettes en classe.

Prendre en compte et respecter les besoins physiologiques favorise au contraire la concentration et les apprentissages. Ainsi, l’attention d’un enfant ne dépend pas de son immobilité ou de son regard fixé sur l’enseignant. Les adultes ne peuvent pas forcer la concentration des enfants par la menace : non seulement parce que c’est violent et non éthique, mais aussi parce que c’est inefficace. Assouplir le temps scolaire, ce serait pacifier l’enfance (les adultes en profiteraient également car ils n’auraient plus besoin de passer par les contraintes et les rapports de force). Par exemple, réaménager les espaces en intégrant un espace de repos en accès libre semble une idée peu coûteuse et facilement réalisable.

Comment osons-nous parquer nos enfants dans ces espaces étouffants qui n’offrent aucune possibilité de s’isoler du bruit, de se ressourcer, de se dépenser ? […] Exiger qu’ils s’adaptent n’est pas la solution. – Juliette Speranza

Rythmes scolaires actuels et rythme biologique des enfants sont inadaptés

Les rythmes circadiens

Juliette Speranza rappelle que plusieurs spécialistes regrettent que les rythmes scolaires ne prennent pas en compte le rythme biologique humain. Tous les êtres vivants possèdent des rythmes biologiques. Un rythme est la reproduction à l’identique d’un même événement en fonction d’une périodicité.

Les rythmes biologiques humains sont :

  • des propriétés de la vie (on ne peut pas s’y soustraire)
  • génétiquement programmés (et donc différents d’un être humain à un autre)
  • multiples (nous possédons 3 classes de rythmes biologiques selon leurs périodes)

Nos rythmes biologiques, qui nous sont donc propres, apparaissent dès la première année de la vie. Or nous n’avons jamais appris à détecter nos rythmes biologiques individuels et les écoles (et parfois les familles) ne prennent pas en compte ces différence interindividuelles de rythmes biologiques.

Les rythmes circadiens sont essentiels : ce sont les rythmes autour du jour, c’est-à-dire qu’ils durent environ 24 heures (mais pas forcément 24 heures précisément car certaines personnes ont un rythme circadien de 20h et d’autres de 28h).

Les rythmes circadiens recouvrent entre autres :

  • le rythme veille/ sommeil

La veille et le sommeil sont interdépendants car la qualité de l’un influence la qualité de l’autre.

  • la température centrale

La température augmente de 1h à 1h30 avant l’éveil spontané (on a donc froid si on se réveille en avance par rapport à l’heure d’éveil spontané).

La température baisse lors du creux méridien en milieu de journée.

Elle baisse également au moment de l’endormissement spontané : le frisson de fin de journée est donc un signe physiologique annonciateur du sommeil.

  • le cortisol

Le taux de cortisol est au plus bas au milieu de la nuit et atteint son pic avant l’éveil spontané (entre 6h et 9h du matin).

Le taux de cortisol baisse lors du creux méridien.

Recommandations des chronobiologistes

L’après midi n’est donc pas équivalent au matin en termes de vigilance, de capacité de concentration et de réflexion. Les enfants ont une meilleure concentration entre 9 h 30 et 11 h 30 puis de 15 heures à 16 h 30. En revanche, un réveil entre 6 h 30 et 7 h 30 ne semble pas favoriser l’attention la première heure de classe. Les horaires du collège et du lycée sont encore moins bien adaptés car le rythme circadien se décale à la puberté et les adolescents ne peuvent pas être alertes et attentifs à 8h.

Les chronobiologistes, qui étudient les rythmes biologiques humains, déplorent depuis des décennies les journées de travail trop longues et les années scolaires trop courtes des élèves français, qui, avec 864 heures de classe par an, battent les records de temps passé vissés sur leur chaise. À la fin de sa scolarité, un élève finlandais aura suivi 2 000 heures d’enseignement en moins qu’un élève français. – Juliette Speranza

L’influence des saisons

De même, il existe une influence des saisons sur les capacités de concentration et d’attention. Certains chercheurs parlent d’une hypersomnolence hivernale qui pourrait être prise en compte dans l’emploi du temps scolaire. On pourrait envisager d’alléger l’emploi du temps des élèves en hiver, parce qu’il n’est pas possible d’avoir les mêmes exigences en matière de compétences et d’attention en cette saison.

Un rythme propre à chaque enfant

En parallèle, il existe un rythme propre à chaque enfant. Pourtant, l’institution scolaire peine encore à prendre en compte la diversité des rythmes et des besoins spécifiques de chaque enfant (notamment pour les horaires de sieste ou pour l’étalonnement des horaires d’arrivée le matin).

Se reposer, se dépenser, manger, apaiser une crise… sont autant de besoins qui ne peuvent être assouvis que de manière individuelle, et personnelle. Former les enseignants aux rythmes biologiques, mais aussi à leur diversité, aux fragilités de certains élèves, fait partie intégrante du projet d’une école humaniste, soucieuse de la réussite de tous. Se satisfaire du même rythme pour tous les enfants aboutit au modèle de l’élève unique, triste clone ayant besoin d’uriner, de sortir, de faire des mathématiques à la même heure. – Juliette Speranza

Adapter l’environnement plutôt que l’élève : des exemples

Juliette Speranza cite plusieurs exemples d’écoles ou de classes qui ont tenté de modifier l’aménagement de la classe et/ou du temps scolaire pour tenter de répondre au plus près aux besoins fondamentaux des enfants.

  • Perrine Sonneville, enseignante dans le Nord, a pris l’habitude de lire plusieurs fois la même histoire en classe, le matin, comme un rituel quotidien. Elle met un point d’honneur à ne pas transformer ce moment sécurisant et serein en une contrainte. Pendant cette lecture, les enfants sont libres de déambuler dans la classe, de jouer, de s’installer dans un coin isolé…

 

  • Juliette Speranza a elle-même animé des ateliers philosophie avec des enfants de 7 à 10 ans, au cours desquels elle a décidé de ne pas se préoccuper de leur attitude. Elle a laissé les élèves s’allonger, s’asseoir où ils le souhaitaient ou encore dessiner. Cela ne les empêchait pas d’être attentifs et de s’intéresser aux débats.

 

  • À l’école Nikola-Tesla, école démocratique à Lyon, les jeunes arrivent et partent de l’école aux horaires de leur choix, tout en s’engageant à respecter un minimum de cinq heures de présence quotidienne. Les arrivées échelonnées se font dans le calme et contribuent à l’instauration d’un climat de sérénité et à une diminution de la fatigue.

 

  • En Finlande, les élèves ont plus de récréations et de souplesse dans leur temps de pause. Après chaque cours de 45 minutes, les enfants bénéficient d’une pause de 15 minutes. Ils sont libres de sortir ou de rester à l’intérieur.

 

  • En 2007, la Nouvelle-Zélande a refondé son système éducatif et en a profité pour réviser l’architecture de ses écoles en mettant en œuvre des espaces d’apprentissage flexibles : du mobilier varié (ballons de gym pour s’asseoir, tapis par terre..), des espaces de solitude, de travail collaboratif, des coins dédiés à la rencontre avec les intervenants… Une place importante est accordée aux espaces ouverts et les élèves ne sont pas cantonnés à un seul lieu selon leur classe d’âge.

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Source : L’échec scolaire n’existe pas ! Une nouvelle chance pour votre enfant de Juliette Speranza (éditions ). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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