L’impasse de la punition à l’école : un livre pour dépasser la discipline répressive (acquisition des savoirs et bientraitance sont compatibles)
L’impasse de la punition à l’école : un livre pour dépasser la discipline répressive (acquisition des savoirs et bientraitance sont compatibles)
Je vous présente un livre pour dépasser la punition à l’école: L’impasse de la punition à l’école : des solutions alternatives en classe d’Éric Debarbieux et Collectif (éditions Armand Colin).
Les points forts de ce livre sur la punition à l’école
Ce livre sur la punition à l’école est une véritable boîte à outils pour les enseignants. Il est écrit de manière très efficace en donnant des chiffres sur la violence à l’école, des éléments théoriques sur les mécanismes psychologiques menant à la violence et tout un panel de solutions alternatives aux punitions (qui entretiennent la violence plus qu’elles ne la règlent).
Le livre est construit autour de 7 grands chapitres :
- Les impasses de la punition (éléments théoriques)
- La discipline coopérative
- La discipline positive
- Le développement de compétences psychosociales
- L’approche systémique et stratégique de l’école Palo Alto
- La Communication NonViolente et les systèmes restauratifs
- Pratiques de justice restaurative
Ce livre est très dense en informations, mais les nombreux exemples de pratiques en classe le rendent très agréable à lire. Il invite à un réel changement de paradigme.
Le mythe du laxisme scolaire
Éric Debarbieux, professeur émérite de sciences de l’éducation à l’université Paris Est Créteil, dénonce, à l’aide de chiffres et statistiques, l’idée facile selon laquelle le laxisme est aux commandes dans le système éducatif (et que ce laxisme serait à l’origine de tous les problèmes de la jeunesse et de nos faibles résultats au test PISA par exemple). Il bat en brèche l’idée selon laquelle acquisition des savoirs et bientraitance seraient incompatibles.
Éric Debarbieux rapport les résultats d’enquêtes quantitatives et d’interventions de terrain menées par le projet ADHERE en France (échantillon de 7 945 élèves interrogés du CE2 au CM2 dans l’académie d’Aix-Marseille, de Lille, de Créteil, de Paris et de Lyon et de 8 921 élèves de collèges interrogés dans 35 REP). Ces résultats montrent que la réalité des élèves est très loin de cette légende urbaine du laxisme scolaire.
Ainsi, au niveau du primaire, les punitions apparaissent fréquentes et répétées pour un nombre non négligeable d’élèves. Ce sont environ six élèves sur dix qui ont été punis, dont plus d’un sur quatre l’ayant été trois fois ou plus. Les punitions ne sont pas rares et peuvent être répétées dès l’élémentaire.
Au collège, les deux tiers des élèves déclarent avoir été punis et plus du quart plus de quatre fois. Ce sont en particulier trois fois plus de garçons que de filles qui déclarent avoir été punis plus de quatre fois.
Près de la moitié des élèves ont été mis en retenue au moins une fois. Un sur cinq a eu des lignes ou de la copie. 8,3 % disent avoir été exclus temporairement de leur établissement et un élève sur cinq déclare avoir été exclu de cours.
Quantitativement, là encore, ce n’est certainement pas une image de laxisme qui se détache. Éric Debarbieux utilise même l’expression de “collège fantôme” : avec son équipe, il a projeté le nombre d’exclusions mesuré à partir de l’échantillon sur l’équivalent du nombre de collèges de certains des départements de ce même échantillon (120 collèges). Le volume d’élèves temporairement exclus avoisine certains mois l’équivalent en nombre d’un collège entier à la porte. Étonnant dans un pays qui insiste sur l’instruction obligatoire (ayant même étendu l’instruction obligatoire à 3 ans récemment… et voulant la passer à 18 ans au lieu de 16 ans actuellement) et qui passe son temps à regretter le laxisme (et le bon vieux temps de la discipline répressive).
L’usage routinier de la punition est inefficace, puisque les mêmes élèves sont souvent à nouveau punis (ils n’ont donc pas appris à se comportement autrement grâce à la punition) et que le recours à la punition est massif (si les punitions éduquaient, il y a belle lurette que l’espèce humaine n’y aurait plus recours puisque tous les humains auraient compris la leçon…)
Dans le cas de l’exclusion temporaire, même les élèves « ordinaires » non exclus sont impactés (être simplement témoins de punitions et d’exclusion joue sur le niveau de stress).
Acquisition des savoirs et bientraitance sont compatibles.
Les auteurs du livre L’impasse de la punition à l’école jugent urgent de penser autrement le problème de la discipline et de violence pour pouvoir agir avec bientraitance et efficacité dans les faits. Debarbieux estime que ces solutions doivent être pédagogiques et éducatives, en laissant de côté la discipline punitive (et notamment la vidéo surveillance ou plus de contrôle). La violence en milieu scolaire est rarement une violence d’intrusion ou le fait d’éléments extérieurs.
Qu’on le veuille ou non, la relation pédagogique est au cœur du problème.
Les auteurs du collectif sont persuadés que, comme le soulignait déjà Fernand Oury : « la parole est pouvoir ». Ils proposent donc de redonner la parole aux élèves en s’appuyant sur le groupe, la coopération et le respect mutuel. Ils rejettent par là en bloc le retour à l’uniforme, au salut au drapeau, à l’estrade et au silence (référence à peine voilée au réseau Espérance banlieue et aux mesures récentes sur la présence du drapeau français en classe).
Les expériences présentées ont des origines diverses mais qui se rejoignent sur ce point clé du rejet de la discipline répressive :
- Pédagogies coopératives s’inspirant de l’approche Freinet
- Communication NonViolente
- Discipline Positive
- Justice réparatrice
- Approche systémique de l’école de Palo Alto
- Éducation émotionnelle et relationnelle (enseignement de compétences psychosociales)
Les expériences présentées dans le livre sont toutes issues du terrain et on ne peut pas faire la critique aux auteurs d’être restés dans leur tour d’ivoire théorique : ils sont allés mettre les “mains dans le cambouis” et montrent que, oui c’est possible de passer de la discipline punitive à la discipline coopérative dans un climat plus pacifique, même dans les classes difficiles (REP +).
Ce changement de paradigme se fait au bénéfice de tous : enseignants, élèves (les violents et les autres qui veulent travailler dans un climat sécurisé) , parents, personnel encadrant et, au final, la société toute entière puisqu’elle y gagne en régulation pacifique des conflits.
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Source : L’impasse de la punition à l’école : Des solutions alternatives en classe d’Éric Debarbieux et Collectif (éditions Armand Colin). Disponible en médiathèque, en librairie ou en ecommerce.
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Crédit illustration : freepik.com