Une pédagogie de l’attention : le geste mental de l’attention

Une pédagogie de l’attention : le geste mental de l’attention

Le geste mental de l'attention

L’attention, mode d’emploi

Faire exister mentalement, sous forme d’image, l’objet perçu constitue la structure du geste mental de l’attention. – Antoine de la Garanderie

Dans son livre Réussir, ça s’apprendre, Antoine de la Garanderie propose une pédagogie de l’attention. Pour lui, faire preuve d’attention, c’est être capable de percevoir (une succession de gestes, une image, des phrases) et les prolonger dans la conscience en les évoquant. Le geste mental d’attention est intrinsèquement défini par le projet de faire exister mentalement en images ce que l’on perçoit et par l’exécution de ce projet.

Ainsi, les yeux et les oreilles ont besoin de se “reposer” régulièrement sur des objets d’inattention. C’est en fait un moment où l’objet qui vient d’être perçu va être porté à l’existence mentale. C’est le moment de la maturité de l’attention, où la conscience en récolte le fruit.

Si celui qui vise à être attentif se propose de récolter sous forme d’image mentale l’objet qu’il va percevoir, il donnera à son geste mental d’attention la structure adéquate. – Antoine de la Garanderie

Par exemple, un.e enseignant.e qui souhaiterait qui des élèves soient attentifs pourrait tenir ce discours :

Regardez ce que je vais dessiner au tableau en ayant le souci de le revoir dans votre esprit. Puis vous confronterez la première image mentale de mon dessin que vous vous serez procurée avec celle que j’ai dessinée, en la regardant de nouveau au tableau. Recommencez ce petit jeu, jusqu’à ce que vous ayez dans l’esprit une image précise de mon dessin.

Ecoutez-moi avec le souci de vous redire mentalement ce que je vais vous présenter. Je vous laisserai du temps pour cette redite mentale. Je redirai, après cette pause, le même discours pour que vous puissiez confronter votre redite mentale avec mes propos.

L’idée est donc de décrire le geste mental d’attention avant d’inviter les élèves à l’accomplir. Ces derniers, informés du projet qu’ils doivent se donner (regarder avec le projet de revoir la chose perçue en image mentale, écouter avec le projet de faire exister mentalement grâce aux images auditives la chose perçue)  et ce qu’ils doivent faire pour être attentifs, ne monopolisent pas de l’espace mental et de l’énergie avec des consignes irréalisables : “il faut que je me concentre”, “je ne dois pas me laisser distraire”.

Cette pédagogie du geste mental est renforcée par la présence de l’objet auquel ils peuvent faire retour pour enrichir l’image mentale qu’ils sont en train de faire exister.  Dans le cas d’objets auditifs, l’enseignant.e sera vigilent.e à revenir sur les points importants, ré utiliser les mêmes mots.

Par ailleurs, les enseignant.e.s doivent laisser le temps aux élèves de réaliser le projet de faire exister mentalement les objets (auditifs ou visuels).

L’attention au service de la compréhension

Antoine de la Garanderie insiste sur la pédagogie de l’attention car il affirme que la compréhension est le fruit de l’évocation mentale  de l’objet perçu (et qu’elle n’est pas le simple effet de la perception comme telle).

C’est seulement lorsque cette existence mentale, sous forme de représentation de ma chose perçue, est effective que la compréhension se produit. – Antoine de la Garanderie

Une erreur pédagogique grave consiste à méconnaître le geste mental d’attention à pratiquer pour ouvrir la voie à la compréhension. Antoine de la Garanderie écrit :

La plupart des élèves dont on déplore le manque d’intelligence, soit qu’ils échouent dans certaines disciplines scolaires, soit qu’ils ne connaissent aucun succès à l’école, ne savent pas comment s’y prendre pour être attentifs. Faute de faire le geste mental de prendre pour soi en faisant exister en images mentales l’objet perçu proposé à leur attention, il leur est impossible d’en avoir l’intelligence au sens second et symbolique du mot comprendre. Il faut se garder de confondre une carence mentale avec ce qui n’est qu’une lacune pédagogique. Pour les élèves qui n’échouent que dans certaines matières, c’est que, pour celles où ils réussissent, ils font le geste d’attention comme il convient mais sans le savoir. Du reste, pour ceux qui n’échouent en rien, il en va de même : le bon geste a été acquis pour causes diverses, sans qu’elles soient consciemment gérées. Notre proposition est le fruit d’un effort de lucidité pédagogique.

Pour une diversité des images mentales

Il en découle que les enseignants doivent opérer un diagnostic afin de savoir quelles sont les images mentales que l’élève utilise, quelles sont celles qu’il n’utilise pas et dont il aurait besoin pour réussir dans la ou les disciplines où il se trouve en difficulté.

En effet, un élève qui n’utilise que des images mentales auditives est incapable de pratiquer le geste d’attention quand le message de l’enseignant.e est visuel. De même, un élève qui n’utilise que des images mentales visuelles est incapable de pratiquer le geste mental de l’attention, quand le message de l’enseignant.e est auditif.

Recommandations pour la pratique en classe

  • Indiquer aux élèves la méthode du geste d’attention
    • Pour être attentif, il faut avoir l’intention de revoir et de redire les objets perçus (images, sons, phrases entendues ou lues)

 

  • Organiser les cours de manière à laisser du temps pour la pédagogie de l’attention
    • Communiquer aux élèves par des moyens visuels et auditifs la notion à assimiler (présenter les messages sous les deux formes)
    • Donner du temps aux élèves pour qu’ils se redisent ou revoient dans leur conscience les éléments explicatifs de la notion (un temps de “maturité” de l’attention)
    • S’assurer que les élèves ont compris la notion en leur proposant des questions ou en leur demandant d’effectuer des exercices

 

  • Faire le point pour les élèves qui n’arrivent pas à acquérir les gestes mentaux de l’attention
    • S’agit-il d’une non gestion par un élève visuel de la présentation auditive ou par un auditif de la présentation visuelle ? (il est possible de proposer des exercices d’évocation aux élèves pour qu’ils développent une agilité intellectuelle – des idées ici)
    • S’agit-il d’une impossibilité à gérer mentalement les images voulues, tant visuelles qu’auditives ? (c’est un problème de nature psychologique et/ou de troubles de l’apprentissage à explorer)

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Source : Réussir, ça s’apprend de Antoine de la Garanderie (éditions Bayard).

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