Le temps d’échange : un outil de discipline positive pour trouver des solutions aux problèmes en classe

Le temps d’échange : un outil de discipline positive pour trouver des solutions aux problèmes en classe

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Un Temps d’Echange en Classe est un outil proposé dans l’approche de la discipline positive telle que conçue par Jane Nelsen.

Ces Temps d’Echange en Classe sont des espaces/ temps planifiés à l’avance et dédiés à la recherche de solutions ensemble face aux problèmes du quotidien, à l’anticipation des difficultés et à la création d’une cohérence de classe. Les Temps d’Echange en Classe sont généralement hebdomadaires (un temps y est dédié une fois par semaine sur un créneau précis).

Plusieurs enseignants qui pratiquent le Temps d’Echange en Classe ont observé que les élèves sont devenus, avec le temps, compétents en communication respectueuse et en résolution de problème.

Il est important de faire confiance au processus et de laisser les élèves faire des erreurs. Il est question de progression et non de perfection.

Dans leur livre  La Discipline positive dans la classe, Jane Nelsen et Lynn Lott proposent une méthodologie pour mettre en place des Temps d’Echange en Classe.

1.Former un cercle.

Nelsen et Lott estiment que l’avantage principal de s’asseoir dans un cercle est de créer une atmosphère de respect dans un esprit démocratique  où tout le monde peut prendre la parole et être entendu.

Il est possible de placer toutes les chaises en cercle sans table devant les élèves (ou même de s’asseoir par terre sur des coussins ou des tapis également). L’enseignant intègre le cercle, au même niveau que les élèves.

Ainsi, chacun peut se voir et faire circuler un bâton de parole. Le bâton de parole, ou autre objet (comme une balle souple), signifie que lorsque l’objet choisi sera entre les mains d’un élève, il pourra exprimer ce qu’il a à dire. Au départ, l’enseignant peut prendre la responsabilité de la gestion du bâton de parole puis un élève sera désigné pour passer le bâton de parole (par l’enseignant dans un premier temps ou, mieux, par l’ensemble du groupe).

Il est important de laisser une part de responsabilité aux élèves pour la mise en place des cercles de parole. Certaines classes auront besoin de plus ou moins de directives de l’enseignant.

Par exemple, il est possible de permettre aux élèves d’organiser la salle sans instructions préalables. En utilisant cette méthode, les classes finissent souvent avec de nombreuses propositions différentes. Ainsi, une classe a formé un carré avec les tables, et les élèves se sont assis dessus.

 

2.Pratiquer l’échange d’appréciations positives.

Commencer le Temps d’Echange en Classe sur une note positive stimule le sentiment d’appartenance au groupe-classe et valorise chacun. Les élèves (comme les enseignants) aiment bien entendre quelque chose d’agréable à leur sujet.

Une façon d’enseigner la formulation des appréciations positives consiste à demander aux élèves de penser à un moment où quelqu’un a dit quelque chose qui leur a renvoyé une image positive d’eux-mêmes. Les élèves peuvent partager leurs expériences chacun leur tour avec le reste du groupe (dans le respect du bâton de parole).

Ensuite, on peut demander aux élèves de réfléchir à quelque chose pour lequel ils aimeraient remercier les autres. On peut leur donner des exemples  :

  • Peut-être aimeraient-ils remercier un camarade de classe de leur avoir prêté un crayon ou de les avoir aidés à faire un devoir  ?
  • Peut-être voudraient-ils remercier quelqu’un d’avoir joué avec eux, de s’être promené avec eux, ou d’avoir déjeuné en leur compagnie  ?

Au début, les élèves peuvent se sentir mal à l’aise à l’idée d’échanger des appréciations positives. Si l’adulte a confiance dans le processus et qu’il donne aux élèves des occasions de s’exercer, leurs compétences s’accroîtront.

 

3.Respecter les différences de chacun.

Il est possible d’enseigner aux élèves comment construire un esprit d’équipe en appréciant les différents points forts présents chez chaque membre du groupe-classe (et même de l’établissement scolaire).

Cela peut se faire en invitant les élèves à adopter le point de vue des autres, à travers des questions telles que :

  • comment l’autre s’est-il senti à ton avis ?
  • que s’est-il dit à lui-même ?
  • qu’a-t-il dit ? qu’a-t-il fait ? à ton avis, qu’est-ce qui l’a amené à agir comme ça ?

Une fois que les élèves auront développé des compétences de respect de la logique interne de chacun, ils sauront créer une atmosphère de respect, socle de temps d’échange en classe efficaces.

Pour aller plus loin : 3 jeux pour apprendre à vivre ensemble en classe et éduquer à l’empathie

 

4.Utiliser une communication respectueuse.

Nelsen et Lott regrettent que la plupart des enseignants pensent que les compétences de communication sont aussi importantes que les compétences académiques, mais qu’ils ne donnent pas aux élèves la possibilité de développer ces compétences par une pratique régulière.

Chaque fois que les élèves ne font pas usage de leurs capacités d’écoute pendant les temps d’échange en classe, les enseignants peuvent  demander  : «  Combien d’entre vous pensent que nous nous écoutons attentivement  ? Combien pensent que ce n’est pas le cas  ?  »

Les élèves peuvent lever la main pour répondre. Habituellement, il n’y aura pas besoin d’en dire davantage pour que le problème se corrige de lui-même.

Les enseignants ont besoin de se familiariser (et probablement de se former) avec les principes de la communication bienveillante et non violente afin d’être de bons exemples à imiter.

Lire aussi : La communication non violente dans l’éducation : un autre regard est possible… et ça change tout !

 

5.Se centrer sur la recherche de solutions.

Lorsqu’un enseignant commence à faire des recherches de solutions avec les élèves lors de Temps d’Echange en Classe, il choisit un problème courant qui offrira des occasions aux élèves de développer des compétences relationnelles (par exemple, doubler dans la queue ou bousculer).

Une des nombreuses façons d’enseigner aux élèves comment identifier des solutions consiste à leur rappeler les caractéristiques d’une solution  :

  • reliée : la solution/ réparation est logiquement liée au comportement.
  • respectueuse : la solution ne doit pas impliquer de dévalorisation, de culpabilisation ou d’humiliation.
  • raisonnable : la solution n’est pas démesurée et parait juste à l’enfant comme à l’adulte.
  • aidante : l’objectif est de trouver une solution et non pas de se venger en infligeant une souffrance.

Nelsen et Lott proposent des étapes pour une recherche de solutions efficace :

  • Partir de la problématique mise à l’ordre du jour du Temps d’Echange en Classe.
  • Utiliser des questions ouvertes pour affiner la problématique ( (comment___? qu’est-ce que__ ?).
  • Organiser des jeux de rôle pour mieux comprendre la situation et ouvrir de nouvelles perspectives.
  • Lister toutes les idées même celles qui paraissent farfelues, insolentes ou punitives sans les discuter et sans jugement.
  • Suivre les étapes pour choisir une solution  :
    • Lire ou faire lire par un élève les suggestions à voix haute.
    • Permettre à l’élève qui a mis le problème à l’ordre du jour de choisir la suggestion qui lui sera la plus utile.
    • Agir de même si un autre élève est impliqué dans cette situation.
    • Demander à tous les élèves impliqués «  En quoi cette suggestion va-t-elle t’aider toi  ? la classe  ? Ou d’autres personnes  ?  »
  • Fixer un délai précis pour essayer la solution  : demander à l’élève ou aux élèves de choisir le moment (ou le jour) pour faire le suivi de la solution choisie.

Dans leur livre, Nelsen et Lott donnent l’exemple d’une enseignante qui avait inscrit à l’ordre du jour la question suivante  : «  Comment les élèves pourraient-ils se calmer  ?  ». Elle commença par demander à ses élèves comment ils se sentaient quand elle leur disait d’être calmes. L’un d’entre eux répondit que cela lui donnait envie d’être méchant avec elle. Elle répondit qu’elle le comprenait, lui et les autres, puis elle dit à la classe qu’ils étaient libres de parler sans être jugés. En fin de compte, les élèves décidèrent de dessiner une grande bouche avec un X en travers sur une grande feuille de papier. S’ils étaient trop bruyants, tout ce qu’elle avait à faire était de leur montrer cette image.

 

6.Pratiquer les jeux de rôles et la réflexion commune.

Le jeu de rôles donne aux élèves l’occasion de se mettre dans la peau des autres (y compris l’enseignant) pour mieux les comprendre. Il instaure une ambiance ludique qui les aide à être plus efficaces pendant le temps de recherche de solutions.

Un jeu de rôle n’a pas besoin de durer longtemps. Certains ne durent qu’une ou deux minutes. Les acteurs vont s’identifier rapidement à leurs rôles (soit distribués par l’enseignant, soit choisis par les enfants) en ressentant ce que les autres ont dû ressentir.

Il est important que les élèves partagent ce qu’ils pensent après chaque jeu de rôle afin qu’ils puissent mieux comprendre ce qui a été éprouvé lors du jeu et, par conséquent, en “vrai”.

Les jeux de rôle sont suivis par une recherche de solutions pour trouver le plus de solutions possibles en un temps assez court. Là encore, il s’agit de rassembler des idées sans jugement ni commentaire car, quand es élèves savent qu’ils peuvent partager une idée sans être jugés, ils se sentent plus libres de prendre des risques dans leurs contributions, au lieu d’éviter de se lancer par peur d’avoir l’air idiot.

Lorsque la recherche de solutions est terminée, l’enseignant demande aux élèves s’il y a sur la liste des suggestions qui ne seraient pas respectueuses, reliées, raisonnables ou aidantes.

 

7.Mettre en place un ordre du jour et respecter le déroulé du Temps d’Echange en Classe.

En amont, lors de la vie quotidienne de la classe, les points à mettre à l’ordre du jour du Temps d’Echange en Classe peuvent être rassemblés de différentes façons :

  • les noter sur un cahier,
  • les noter sur un bloc-notes,
  • les noter sur un coin du tableau,
  • les glisser dans une boîte dédiée.

Le simple fait de noter le problème participe à faire baisser les émotions fortes et à améliorer les relations entre élèves.

Si un élève vient se plaindre d’un autre, on peut alors lui suggérer d’en parler au cours du prochain Temps d’Echange en Classe et de l’ajouter à l’ordre du jour. Il est également envisageable de leur demander s’ils peuvent trouver une autre solution maintenant qui fonctionne pour eux.

Une façon de respecter l’ordre chronologique dans lequel les sujets arrivent dans la boite est d’utiliser des papiers de couleurs différentes chaque jour (par exemple, le lundi les papiers sont blancs, les mardis bleus…).

Certains enseignants demandent aux élèves de mettre des problèmes à l’ordre du jour sans préciser leur nom, afin que l’ensemble de la classe puisse travailler sur des solutions générales.

Il arrive d’ailleurs fréquemment que les élèves disent que tel problème n’en est plus un car ils ont déjà trouvé une solution entre la mise à l’ordre du jour et le Temps d’Echange en Classe.

 

8.Comprendre et savoir utiliser le tableau des quatre buts/ objectifs

Nelsen et Lott rappellent qu’un élève qui se comporte de façon inappropriée est un élève découragé. Lorsque les élèves ont la conviction qu’ils n’ont pas leur place, ils tendent en général inconsciemment vers l’un des quatre buts suivants  :

  1. Accaparer l’attention
  2. Prendre le pouvoir
  3. Prendre une revanche
  4. Confirmer sa croyance d’incapacité.

Nelsen et Lott appellent ces objectifs des «  objectifs mirages  ». Elles comparent le comportement inapproprié et ce qui le motive à un iceberg  :

  • la partie émergée de l’iceberg correspond au comportement inapproprié (ce que l’on voit).
  • la partie immergée de l’iceberg correspond à ce qui motive le comportement inapproprié  : trouver sa place (besoin d’appartenir et de compter) par une stratégie inconsciente (l’objectif mirage).

La majorité des élèves comprend très bien les quatre buts/ objectifs mirages et semble soulagée d’apprendre ce qui se passe en eux et chez les autres.

Certaines écoles affichent les grilles d’identification des 4 buts/ objectifs mirage dans chaque classe, ce qui aide les enfants à identifier le découragement d’un camarade, et à proposer rapidement un moyen de l’encourager.

 

Comme dans toute proposition, la souplesse de l’enseignant est primordiale : parfois, mieux vaut sauter le cercle d’appréciation afin d’attaquer tout de suite la recherche de solution, parfois, le jeu de rôle suffit à faire baisser le niveau d’agressivité sans qu’une solution ait besoin d’être trouvée ensuite.

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Source : La Discipline positive dans la classe de Jane Nelsen et Lynn Lott (éditions Le Toucan). Disponible en librairie, en médiathèque ou sur internet.

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