Accompagner les apprentissages des enfants et adolescents avec la pédagogie positive : outils et ressources

Accompagner les apprentissages des enfants et adolescents avec la pédagogie positive : outils et ressources

apprendre avec la pédagogie positive

Le regard porté sur les enfants peut être positif ou négatif, encourageant ou démotivant

Le regard porté sur les enfants peut être positif ou négatif : quel regard les adultes portent-ils sur les enfants et les adolescents en situation d’apprentissage, quels que soient ses compétences, sa personnalité, ses résultats ou ses troubles ? Un enfant ne se réduit pas à ses notes et il y a bien plus que l’école dans la vie.

Les étiquettes (“on est nul en maths dans la famille”, “tu es trop lent pour y arriver”) et les jugements (“tu n’y arriveras jamais”, “5/20, c’est nul”) sont limitants et démobilisant. Une démarche encourageante se concentre sur la démarche, le processus et les stratégies plutôt que sur le résultat, la note.

Faire le lien entre les efforts et le résultat (la note) permet aux enfants et adolescents de piloter et rediriger leur travail :

  • qu’est-ce qui a fonctionné (ce qui a permis de gagner des points lors de l’évaluation) ? quelle a été la stratégie adoptée ?
  • qu’est-ce qui n’a pas fonctionné ? qu’est-ce qui n’est pas encore compris et acquis ?
  • qu’est-ce qui reste à faire et à travailler ?

Pour aider les enfants et les adolescents dans leurs apprentissages et répondre efficacement à ces questions, il est important d’avoir en tête les gestes mentaux de l’apprentissage, le rôle des émotions et celui du corps.

Les gestes mentaux de l’apprentissage

Avoir en tête les gestes mentaux de l’apprentissage tels que décrits par Antoine de la Garanderie permet de  répondre efficacement à la question “comment tu fais quand tu réussis ?”.

Antoine de la Garanderie définit 5 gestes mentaux :

1.L’attention (être connecté avec ce qui se raconte, être ouvert et branché sur l’extérieur avec une adéquation parfaite entre ce qui se passe à l’intérieur et ce qui se passe à l’extérieur)

2.La compréhension (la compréhension est le résultat du lien entre une nouvelle information et une information déjà en stock dans la mémoire)

3.La mémorisation (la mémorisation est la mise en  stock des informations pour pouvoir les remobiliser en cas de besoin. On ne peut pas apprendre à partir de rien !)

4.La réflexion (iI s’agit de l’acte le plus complexe. La réflexion mobilise l’efficience des actes mentaux précédents car nous devons confronter des données à des règles et des lois auparavant mémorisées et comprises. Elle nécessite des liens avec les acquis.)

5.L’imagination créatrice (la capacité à trouver des solutions, l’imagination permet de trouver des réponses inédites à des questions inédites).

A ces 5 gestes mentaux, s’ajoutent trois étapes :

  • la perception (percevoir le monde avec les sens),
  • l’évocation (donner une existence mentale au monde réel de façon consciente),
  • le projet mental (donner du sens et une direction à l’activité mentale).

En cas d’échec ou d’erreur, on peut alors se demander où le processus d’apprentissage coince.

Par exemple, il se peut que l’enfant ou l’adolescent ne soit pas attentif :  il pense à autre chose, il est dans son monde intérieur mais n’est pas réceptif aux informations venues de l’extérieur. Ou alors il se peut que les consignes n’aient pas été traduites en projet mental concret et précis.

Le rôle des émotions

Apprendre, c’est apprendre avec son cœur, avec ses émotions. Les émotions ne sont pas bonnes ou mauvaises, positives ou négatives en soi, elles sont confortables ou inconfortables.

La peur, la colère, le stress sont des émotions fréquentes face à la nouveauté, face à un défi. Or la peur, la colère ou le stress à un niveau non maîtrisé coupent de la capacité de réflexion.

Une manière efficace de reconnaître les émotions inconfortables qui entravent l’apprentissage des enfants est de pratiquer l’écoute active : “J’ai l’impression que ça ne va pas. Tu as l’air découragé et tu n’arrives plus rien à faire. On va faire une pause et recommencer plus tard.”

Des petites activités de recentrage ou de gestion du stress peuvent être utiles à l’école ou à la maison, soit pour gagner en gestion émotionnelle et faire de la prévention, soit pour faire face aux situations d’urgence et faire redescendre la pression.

Le rôle du corps

Nous ne somme pas que des esprits. Un corps en bonne santé est un allié des apprentissages efficaces :

  • l’eau est indispensable. Permettre aux enfants et aux adolescents de s’hydrater régulièrement est nécessaire. Leur proposer de boire un grand verre d’eau en cas de blocages est également utile.
  • le sommeil joue un rôle primordial pour de  bonnes dispositions physiques  mais également pour la consolidation des informations lors du sommeil paradoxal.
  • l’excès de sucre en situation d’apprentissage entrave les mécanismes mentaux (l’énergie mobilisée pour l’assimilation du sucre ne peut pas être mobilisée pour réfléchir).
  • s’aérer et bouger sont des besoins fondamentaux que ce soit en classe ou à la maison (par exemple, les pauses actives peuvent être introduites en classe)

Des outils efficaces pour faciliter les apprentissages

Attention et concentration

On peut expliquer aux enfants et aux adolescents la différence entre être attentif et être concentré, dans quelles circonstances l’attention est utile et dans quelles autres circonstances c’est la concentration qu’il va falloir mobiliser, puis enfin fournir des outils facilitateurs.

Etre attentif, c’est être branché sur l’extérieur; être concentré, c’est être branché à l’intérieur de soi pour aller chercher des ressources internes en stock dans la mémoire.

Quand l’attention est mobilisée, la concentration n’est pas possible. Ainsi, on comprend qu’un élève qui fait attention aux moindres bruits dans la classe ne peut pas être concentré sur un travail à faire. Faciliter la concentration des enfants et adolescents, c’est leur permettre d’aller en eux-mêmes.

Des outils pour la concentration : Comment se concentrer efficacement (et rester concentré) : la technique PIM

L’évocation

La perception est une activité sensorielle (effectuée par les sens de la perception). L’évocation est ce qui rend présente cette réalité dans notre cerveau sous formes d’images mentales (ici “images” signifie ce qui est imaginé donc ces images ne sont pas forcément visuelles). Les images mentales se passent toujours à l’intérieur (auxquelles les autres personnes ne peuvent pas avoir accès de l’extérieur). Par exemple, quand on parle d’évocation, on peut parler d’images sonores.

Ce qui fait souvent la différence dans les différences de résultats des élèves est la qualité des évocations : certains élèves ont des évocations complètes, entraînée, automatisées et sur la même longueur d’onde que la langue mentale du professeur.

De même qu’il est possible d’apprendre d’autres langues que notre langue maternelle parlée qui sert à communiquer à l’extérieur, il est possible d’apprendre d’autres “langues du cerveau” pour bien communiquer avec soi-même.

De la même manière que nous pouvons combiner nos perceptions (on peut percevoir un gâteau avec la vue, l’odorat et le goût), il est possible d’évoquer une même réalité perçue avec plusieurs sortes d’évocations (image d’un gâteau, évocations olfactives ou gustatives, nom du gâteau écrit ou prononcé…).

Ce qui est important pour la personne qui accompagne un enfant ou un adolescent, ce n’est pas tant de connaître précisément les évocations qu’ils utilisent mais de les renseigner sur leurs capacités à utiliser leurs propres évocations. Accompagner quelqu’un dans son apprentissage, c’est lui permettre de connaître et d’utiliser au mieux ses habitudes évocatives, mais également de développer des habitudes complémentaires.

Pour aller plus loin : Apprendre à apprendre : connaître ses habitudes évocatives et développer des habitudes d’évocation complémentaires

La mise en projet

Le cerveau humain déteste ne rien faire. Il aime l’action et il s’auto prescrit quelque chose à faire s’il n’a pas de consigne ou des consignes qui n’invitent pas à l’action (par exemple, face à une consigne telle que “prendre connaissance”, le cerveau va inventer une consigne d’action car cette consigne n’est pas porteuse de projet en soi).

Plus une consigne est ciblée, formulée en langage positif d’action, mieux l’apprenant sait quoi faire. En cas de consigne peu claire, il est important d’apprendre aux enfants et adolescents à se mettre en projet en traduisant ce qui est attendu d’eux.

Des outils de mémorisation

On  le droit de s’approprier les leçons et les cours comme on veut. Tant qu’on est capable de restituer une information correctement, la manière d’apprendre et le chemin emprunté pour remobiliser l’information importe peu. Chacun est libre d’utiliser son cerveau de la manière la plus efficace pour lui.

La manière le plus efficace pour mémoriser est de faire exister mentalement une même information de plusieurs façons. De nombreux outils sont utilisables à cet effet, et entre autres :

Le rôle des émotions agréables (humour, bienveillance, environnement riche)

L’humour est un puissant catalyseur d’émotions. Or, comme expliqué plus haut, apprendre, c’est apprendre avec son coeur, avec ses émotions. Autant les émotions désagréables peuvent bloquer les apprentissages, autant les émotions agréables peuvent faciliter les apprentissages.

On peut comparer le cerveau des enfants à un ordinateur mais beaucoup plus puissant et d’une nature évolutive, dont le moteur est émotionnel (recherche du plaisir, de la joie).

Les adultes doivent fournir à ces « supers‐ordinateurs » un environnement enrichi et un enseignement structuré et exigeant (tout en étant accueillant, bienveillant, et tolérant à l’erreur).

Les ordinateurs biologiques que sont les bébés et les enfants sont conçus pour fonctionner comme éléments d’un réseau social complexe. La quantité et la qualité des interactions sont primordiales (enfants/enfants et adultes/enfants).

L’interaction entre enfants et adultes est aussi naturelle et profondément enracinée que nos autres composantes. – Gopnik

Il est important de garder en tête que les choix pédagogiques effectués par les enseignants et leur manière d’être (montrer le bon exemple dans le cadre de l’imitation sociale, créer un climat générateur d’émotions agréables) peuvent avoir un impact sur les modifications structurelles du cerveau des enfants et des adolescents.

 

Avertissement :

Je suis aujourd’hui (2020) beaucoup moins enthousiaste au sujet de la pédagogie positive qu’à la rédaction de cet article (2017). Le livre Apprendre Autrement avec la Pédagogie Positive de Audrey Akoun et Isabelle Pailleau (éditions Eyrolles) s’appuie sur de nombreuses informations considérées comme des neuromythes dont la théorie des profils visuel/ auditif/ kinésthésique et la Brain Gym. La gestion mentale est également sujette à caution.

Je vous invite à lire cet article pour aller plus loin : Neurosciences : 15 neuromythes toujours prégnants en pédagogie

Ce livre reste néanmoins une porte d’entrée vers la bientraitance éducative dans le sens où les enfants y sont valorisés et qu’une approche non punitive y est défendue. Des ouvrages plus récents ont désormais ma préférence tels que Les neurosciences en éducation (éditions Retz) ou, pour aller encore plus loin dans la bientraitance et le respect des droits des enfants, Libre pour apprendre de Peter Gray (éditions Actes Sud).